Pourquoi DRH et Directions Financières ne sont pas d’accord sur les chiffres de la masse salariale ?
De manière générale, lorsque l’on parle de masse salariale, personne n’a les mêmes chiffres. Des indicateurs ont les mêmes libellés mais reflètent des réalités différentes. Et pour cause !
Tout d’abord, un ensemble de détails sont ou ne sont pas pris en compte par les deux directions dans le calcul. Par exemple, prend-on en compte les avantages en nature ? Et le coût des indemnités de départs ? Et les provisions ?
Ensuite, tous les éléments ne sont pas pris en compte de la même manière. Par exemple, les éléments rétroactifs sont-ils pris en compte à leur date de paiement ou à leur date d’acquisition ? Décomptons-nous un effectif moyen, des ETP ?
Enfin, tous les chiffres ne sont pas toujours disponibles dans les systèmes d’informations.
Un peu d’histoire… la masse salariale « Toutée »
Du nom du conseiller d’état qui a posé cette définition de la masse salariale en 1964, elle a pour objet la prise en compte des seuls éléments récurrents de la rémunération, quelle que soit la périodicité. Elle focalise également sur les seuls éléments ayant un caractère général et exclu les éléments individuels.
Ainsi, dans cette définition, des éléments comme les coûts des départs sont exclus, ainsi qu’un avantage dispensé à un seul employé, par exemple un cas exceptionnel de relocalisation.
Cette définition est au cœur de l’approche publique de la masse salariale. Elle est avant tout très utilisé pour mener des négociations salariales.
La masse salariale selon l’INSEE
Selon l’INSEE, « la masse salariale est le cumul des rémunérations brutes des salariés de l’établissement. ». Ainsi, elle prend en notamment compte le salaire de base, les primes et indemnités, les heures supplémentaires.
De fait, elle exclut les charges patronales ou les provisions. Elle n’exclut pas, en revanche, les éléments exceptionnels, comme par exemple les indemnités de licenciement.
L’intérêt de maîtriser cette définition de la masse salariale est de pouvoir se comparer aux chiffres publiés annuellement par l’INSEE.
La masse salariale selon la DRH
La masse salariale gérée dans les départements des ressources humaines est souvent dénommée « masse salariale chargée », c’est-à-dire de manière simple, la masse salariale INSEE complétée des charges patronales.
Cependant, des questions se posent concernant les éléments exceptionnels que certaines DRH veulent voir exclus. Des questions se posent, par exemple concernant des éléments tels que les avantages en nature ou les frais professionnels.
Lorsque nous travaillons sur les effectifs ou les coûts par employé, les DRH travaillent souvent en effectif moyen / employés payés.
La masse salariale selon la Direction Financière
La masse salariale dite « financière », également dénommée « coût du personnel » a tendance à prendre en charge les provisions pour congés payés et de temps à autres d’autres provisions, comme des provisions pour CET, litiges aux prud’hommes…
Lorsque nous travaillons sur les effectifs ou les coûts par employé, les DAF travaillent souvent en ETP.
La question de la prise en compte ou pas des éléments exceptionnels, comme par exemple les indemnités de licenciement, s’y pose également.
Les frais professionnels sont le plus souvent exclus. Cependant, il n’est pas du tout inutile de les suivre de manière complémentaire, car ils sont une des composantes du coût de l’emploi.
Une approche commune ?
En soit, aucune des définitions de la masse salariale est intrinsèquement meilleure qu’une autre. Le plus important n’est pas tant de débattre sur ce qui doit ou ne doit pas être pris en compte dans la masse salariale. Le plus important est de savoir ce qu’on y met, de conserver une définition stable et enfin de comprendre l’impact de chacune des composantes.
Rien n’empêche DRH et DAF d’avoir deux définitions différentes. Ce qui importe est que ces définitions aient chacune des composantes clairement définies et leurs apports respectifs en terme d’indicateurs de pilotage.
Le professeur Bernard Martory dans son ouvrage « Contrôle de gestion sociale » nous propose la représentation suivante de quatre niveaux de la masse salariale :
- Masse salariale : sommes des rémunérations perçues par les salariés
- Masse salariale chargée : masse salariale + charges sociales et parafiscales
- Coût du personnel : masse salariale chargée + avantages en nature + charges connexes directes (CE, formation) + intéressement + intérim + sous-traitance
- Coût total du travail : coût du personnel + frais de gestion de la main d’œuvre
Cette représentation est un exemple efficace dans la mesure où chaque niveau ajoute au niveau précédent, sans rien n’y soustraire.
Il est aussi important de tenir compte de la disponibilité des informations ou de la granularité de l’information. Par exemple, la part mutuelle employeur n’est pas toujours disponible.
Il est conseillé d’être tout d’abord capable de maîtriser une masse salariale et, dans un second temps, de prendre en compte les éléments nous permettant de croiser nos chiffres avec les autres directions ou avec l’INSEE.
Enfin, instituer une bonne coopération entre DRH et DAF est essentiel. Une étude de l’ANDRH descend en profondeur sur ces sujets :